BREF REGARD HISTORIQUE

Publié le par Federico

BREF REGARD HISTORIQUE

Dans l’évolution des médias et des pratiques journalistiques, le sport et l’information sportive ont souvent été un lieu initial d’expérimentation, d’actualisation et d’appropriation des nouveaux moyens techniques. Si le sport a souvent servi de terrain d’échauffement aux nouvelles techniques médiatiques, de même le journalisme sportif a toujours entretenu un rapport particulier à l’événement. La configuration médiatique (de la presse écrite à la télévision) a historiquement contribué à la mise en place de compétitions et d’organisations sportives. Elle a également imposé une adaptation continue des dispositifs et des règlements sportifs aux nouvelles techniques et procédures médiatiques. Cette double constatation ne paraît pas être démentie aujourd’hui, à l’heure où le récit médiatique du sport se constitue de plus en plus comme un objet de recherche. Mais avant d'aborder plus avant ces questions, concentrons-nous brièvement sur quelques éléments ou événements importants de l'histoire des relations entre les sports et les médias. Évoquons-les en recourant à quelques citations et en commençant par la presse écrite. “Historiquement, les premiers articles sportifs se situent vers le milieu du XVIIIe siècle. En 1733, The Boston Gazette décrit le combat de boxe professionnel opposant John Faulconer et Bob Russel. (…) Le premier véritable journal spécialisé en sport fut le Bell's Life, créé en Angleterre, en 1938, par des coureurs professionnels. A ses débuts, il ne paraissait que le dimanche. En France, paraît en 1854, Le Sport à raison de deux numéros par mois. Il s'agit d'une revue réservée à un certain public aristocratique. Le tirage est donc faible et c'est la bicyclette qui va favoriser l'essor de la presse sportive”. L'événement qui marqua alors l'évolution de la presse sportive fut la lutte farouche qui opposa Le Vélo, fondé en 1891 par Pierre Giffard et Paul Rousset (au lendemain d'une course Paris-Brest-Paris) et L'Auto-Vélo d'Henri Desgrange. “Le Tour de France est issu de ce combat. Créé en 1900 par des constructeurs automobiles indisposés par les prises de position de Giffard en faveur de Dreyfus, L'Auto-Vélo s'inscrivait clairement dans une logique de concurrence. Condamné en 1903 pour usurpation de titre L'Auto-Vélo se rebaptise L'Auto. Craignant de ne plus intéresser les passionnés de cyclisme, Desgrange cherche une riposte. C'est le plus jeune des collaborateurs qui lui apporte l'idée qu'il cherchait: “Paris-Roubaix, Bordeaux-Paris, c'est vieux jeu, maintenant pour frapper l'imagination du public, il faut aller loin et faire, par exemple, un Tour de France”. C'est Géo Lefevre qui lance cette idée, apparemment faite pour la démesure, qui vaudra à L'Auto, puis à L'Équipe de s'imposer”. C'est ainsi, à l'initiative de la presse, que le premier Tour de France eut lieu en 1903. Cette relation économique et d'organisation entre les médias et les épreuves sportives continua. L'Équipe créa “Les 24 heures du Mans” en 1923 et en Belgique, au fil des ans, les journaux contribuèrent également à la mise sur pied d'épreuves sportives. Il peut être intéressant de jeter, à ce moment, un rapide coup d'oeil sur l'évolution de la presse sportive quotidienne et francophone de Belgique. C’est le 13 octobre 1907 que Le Journal de Tous les Sports est né. Dirigé par Alban Collignon, ce journal était, en fait, un hebdomadaire. Quelques mois plus tard, le 26 février 1908, le journal changeait de nom et devenait Le Vélo. Paraissant le mardi soir, il se présentait comme l’organe belge du cyclisme, de l’automobilisme et des sports athlétiques. C’est, en fait, le 20 août 1911 que débuta la parution quotidienne de ce journal. Le Vélo devenait alors Vélo-Sport, organe officiel de tous les sports, mais aussi du comité sportif de la L.V.L.B. (Ligue Vélocipédique Belge). Le rédacteur en chef est Armand Vallée, la direction restant aux mains d’Alban Collignon. La guerre provoqua l’interruption de la publication qui reprit le 16 novembre 1918, mais pas de façon quotidienne. Dans un premier temps, Vélo-Sport parut trois fois par semaine, soit le lundi pour les résultats, le jeudi pour les commentaires et le dimanche pour les annonces de réunion. A la mort d’Alban Collignon, la direction revint à Léon Van Den Haute et, le 2 février 1924, Vélo-Sport devint Les Sports et Vélo-Sport. Le but était de donner une signification plus large et moins restrictive au titre. Le 1er octobre 1924, un nouveau changement intervint. La couleur du journal passait au rose comme le quotidien italien, La Gazetta dello Sport. Le dernier grand changement de l’avant-guerre sera une nouvelle modification du nom du titre, Les Sports et Vélo-Sport devenant Les SportsLe quotidien dirigé par Paul Bevin, cessera de paraître durant la guerre et connaîtra quelques difficultés pour reparaître à la libération. Il allait d’ailleurs, temporairement, être suppléé par son homologue néerlandophone, Sporting, qui publia trois numéros en français. Le 10 mars 1945, le journal Les Sports reparaissait sous la direction de Pierre Stasse, avec Jacques Lecoq comme rédacteur en chef. Un accord de partenariat fut conclu, à l’époque, avec Sporting. Plus tard, le quotidien Les Sports allait se doter d’un supplément de quatre pages (dont une consacrée au cinéma), Les Sports-dimanche dont le rédacteur en chef était Auguste Van Schoore. Ce supplément subsista jusqu’au 11 mai 1969. Le 10 août 1969, Les Sports devenaient le supplément sportif de La Dernière Heure et cette “absorption” signifiait la fin de la presse sportive quotidienne en Belgique francophone. Cependant, entre-temps quelques tentatives se signalèrent dans ce secteur. C’est ainsi que le 1er mai 1903 naissait Le Sportsman, Le quotidien de tous les sports. Issu de l’union entre Le Sportsman belge et Bruxelles Sport, ce quotidien était composé de quatre pages et, malgré le fait qu’il se présente comme le journal de tous les sports, le sport dominant était les courses hippiques. Fondé par Horace Lennard et dirigé par Paul de Borman, il paraissait tous les soirs aussitôt les derniers résultats de la journée collectés. Mais seuls les abonnés bruxellois recevaient le journal le soir même. La première guerre mondiale interrompit la parution jusqu’au 13 avril 1919. Il reparut sous le nom Le Sportsman, Journal quotidien de sport hippique. Les autres sports étaient écrits, en plus petits caractères, sous le titre générique. En décembre 1959, il devenait Le Nouveau Sportsman et se présentait comme un journal quotidien hippique complet et indépendant. Sa durée de vie n’allait cependant plus être très longue puisqu’il disparaissait le 5 juillet 1962. Un autre quotidien de sport hippique a également existé entre 1914 et 1989. Il s’agissait de Sport-Elevage. Mais, contrairement au journal Sportsman, il n’a jamais traité que le sport hippique. En 1975, il est devenu Sport & Turf avant de devenir, le 3 janvier 1989, Tiercé Belge-Sport & Turf, le quotidien officiel des courses hippiques belges. Un mois plus tard, la formule quotidienne était abandonnée. La publication devenait hebdomadaire et prenait le titre de Tiercé Belge – PMU MagazineD’autres quotidiens ont connu une existence bien plus brève, comme par exemple Sporting. Né le 27 mai 1928 avec l’aide de Victor Boin, président, à l’époque, de l’Association professionnelle belge de journalistes sportifs (APBJS), ce journal voulait être le journal de tous les sports et du tourisme. Il paraissait le dimanche, le lundi, le mercredi et le vendredi avant de devenir quotidien le 4 novembre 1928. Dirigé par Fernand Germain, ce journal voulait déborder du champ strictement sportif. Il voulait aussi tenir ses lecteurs au courant “des nouvelles que l’on veut généralement connaître, c’est-à-dire le résumé des faits du jour, de Belgique et de l’étranger, d’ordre politique et autres, les nouvelles de la Bourse, le mouvement théâtral et cinématographique”. Ce quotidien disparut le 20 janvier 1929. Belgique-Sport fut un autre quotidien éphémère. Il avait tenté de prendre la place laissée vacante, après la seconde guerre mondiale, par Les Sports, journal qui éprouvait, rappelons-le, des difficultés pour reparaître. Imprimé sur papier jaune (en référence-opposition au rose des Sports), il sortit de presse et apparut pour la première fois le 28 octobre 1944. Les difficultés de l’époque ne lui permettent de paraître que trois fois par semaine: le lundi, le jeudi et le dimanche. Dès que Les Sports refit surface, la concurrence fut vive. Belgique-Sport ne résista pas et disparut le 27 janvier 1952. Comme on le voit, la presse sportive quotidienne n’a jamais été véritablement luxuriante en nos contrées, même si certains titres ont connu, à des époques bien déterminées, un certain succès. Pour en terminer avec la presse écrite, il faut encore souligner que, en ce qui concerne la presse quotidienne générale, la place du sport varie évidemment d'un titre à l'autre, mais globalement représente une part importante de l'information traitée. Par ailleurs, la presse magazine a connu également des évolutions et des soubresauts nombreux. Mais un constat s'impose: s'il existe peu de publications sportives “généralistes”, les revues spécialisées (dont le rythme de parution est pour le moins variable d'un titre à l'autre) sont de plus en plus nombreuses, même si certaines d'entre elles se caractérisent surtout par leur caractère éphémère. Envisageons maintenant successivement et succinctement la radio et la télévision. “Avec l'apparition de la radio, l'événement sportif peut être vécu en direct. Le temps et la distance sont abolis. Le sport profite donc pleinement de ce moyen de communication de masse. La radio se développe au cours des années 20. La boxe constitue l'une des disciplines qui bénéficient de ce média. En 1921, le match Dempsey-Carpentier, dont la recette dépasse le million de dollars, est retransmis aux Etats-Unis par KDKA, radio qui commente aussi les matchs de base-ball. L'apparition du transistor, qui miniaturise le récepteur, va décupler l'influence de la radio”. Les émissions sportives en radio vont être d'une véritable importance car, d'une part, elles permettent d'introduire et de maîtriser “l'art du direct” et, d'autre part, elles innoveront, par exemple en introduisant le multiplex, c'est-à-dire en offrant aux auditeurs la possibilité d'être “à chaud” présents, en même temps, dans plusieurs stades de football ou “sur” plusieurs compétitions. Mais très vite, la télévision va apparaître et revendiquer une place de choix dans la couverture des événements sportifs. “Au fil des années qui l’ont vu grandir, la télévision a donné de furieuses envies commerciales à toutes les sociétés sportives. On se souvient du temps des balbutiements où la fédération française de football multipliait les courbettes pour que soient diffusées les meilleures rencontres du calendrier. Il n’était point question alors de contrats mirifiques propres à gonfler un compte en banque et à faire vivre toute une galaxie d’exploitants de champions... “Je vous en prie, inscrivez ce match au programme”... demandaient respectueusement aux chaînes les responsables du ballon rond. Le petit écran, avec un brin de vanité, se voulait –à ses timides débuts– mécène d’un monde de prétendus amateurs dont il n’avait pas su prévoir l’ardeur affairiste. A la vérité, l’époque bénie des échanges gratuits n’aura duré que de courtes saisons. Les patrons des plus grandes disciplines du sport ont vite compris que Dame Télé pouvait être à la fois une découvreuse de talents et une usine à fric. Portés par des imprésarios qui venaient faire leur pelote, ils ont négocié, au cours d’années fastueuses, les apparitions sur l’écran de chaque événement d’importance.” . L’histoire du direct et des moyens techniques en télévision passe inévitablement par le sport: 1948, arrivée du Tour de France en direct au Parc des Princes; le zoom en 1954, année de l’avènement de l’Eurovision; la caméra HF en 1957; l'apparition du ralenti en 1967… sans compter l’utilisation de l’hélicoptère et des motos pour les prises de vues, la superposition d’images, l’apparition de la couleur ou de la TVHD (télévision haute définition). Le sport a été un véritable laboratoire de la télévision. Il faut ajouter aussi que les propriétaires de médias ont continué à oeuvrer à la création de compétitions. Ainsi, à titre d'exemple, relevons qu'en 1986, les “Goodwill Games” sont créés par Ted Turner, PDG du groupe multinational de communication TBS. Ces jeux offrent à la fois un programme et un gisement d'audience. 

 

 

 

Prof.Gérard Derèze. «Société et sport». Université catholique de Louvain-la-neuve. Département communication
(Page consultée le 24 Mars 2006)

  

Publié dans Dossier

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